ProPulse Festival (06-08/02/2019)

52483192_261904344708128_5206167860799340544_nRetour sur deux soirs au festival ProPulse à essayer de découvrir les tendances, les artistes qui vont marquer les prochains mois et qui sait, peut-être les prochaines années. Entre marché et grand public, tout le monde a son avis sur les découvertes, sur les déceptions. Il va de soi que moi aussi.

Premier jour

Martha Da’ro, la veille d’ouvrir pour Years And Years à la Lotto Arena, inaugure les trois jours de ProPulse à la Rotonde. Accompagnée par sa cousine aux machines, Martha Da’ro, qu’on avait déjà pu voir dans le film Black, balance entre hip-hop et soul à l’ancienne une prestation parfaitement convaincante. La voix est là, les chansons aussi, quelque chose se passe. Il y a encore quelques maladresses dans l’attitude, mais on sent un potentiel qui risque bien vite de dépasser nos frontières.

Qui trop embrasse mal étreint. Ça pourrait résumer la musique de Saudade. Tous les genres sont abordés par de bons musiciens du hip-hop au free-jazz en passant par le prog-rock, et ce en moins de trente minutes; le grand écart fait souffrir. La démonstration technique ne m’emporte pas, l’énergie me semble artificielle. Je m’ennuie assez rapidement. Je ne ressens pas d’émotion. Pas grave, passons à autre chose.

L’EP d’Esinam m’a bien plu mais le premier concert vu ne m’avait pas marqué; je ne sais donc pas à quoi m’attendre. Effets électroniques préenregistrés en veux-tu en voilà, même les voix ne sont pas toutes faites en live; seule la flûte originale, envoûtante, trippante sera toujours réelle, organique. Alors, je comprends, les morceaux, de par l’impossible recréation de tant de couches perdent de leurs âme, de leur essence quand ils sont transposés sur scène. Tout n’est pas fait pour être joué par des machines.

J’en ai déjà parlé, mais j’ai un énorme problème avec le jazz. Je peux trouver ça bien exécuté, bien composé, rarement plus. Pourtant à quelques moments avec The Brums, par le groove apporté par les cuivres et les claviers, j’arrive à dépasser mes réticences bien ancrées. Évidemment, je trouve par moments qu’il y a trop de notes, que la recherche constante se fait trop ostentatoire, mais au final reste une impression de bonne humeur, de simplicité. Peut-être la raison pour laquelle ils sont signés chez Luik Records (basé à Liège, ils ne manquent pas une seule occasion de rappeler la fierté de leur ville), un des meilleurs labels belges du moment.

52123825_242105970025402_1113776622915289088_nOn finit la soirée avec Sparkling Bits, soit trois mecs derrière des machines. On ne détermine pas bien qui fait quoi mais ce n’est pas très grave. Groove psyché lent, on se laisse prendre sans trop devoir se forcer par la douce transe proposée. Ce n’est pas toujours dansant, ça entraîne juste ailleurs, puis on reviendra sur terre quand un étrange intermède par une chanteuse survient comme un cheveux dans la soupe. Entre soul ringarde avec plein de vibes et excitation surjouée, son départ ne pourra pas nous permettre de rentrer à nouveau dans le concert et c’est bien dommage.

Deuxième jour

Je rate l’essentiel de la prestation de Ozferti parce que la STIB en a décidé ainsi. Parfois il faut accepter que certains éléments seront plus forts que toute notre volonté. Et ça me semble bien dommage à l’écoute d’une dizaine de minutes d’électro aux ambiances afro qui ne sombre pas dans l’exotisme de pacotille. Mais pas le temps de râler car déjà il est temps de se rendre à l’Orangerie.

Glauque est un peu un des projets dont on parle le plus dans le petit milieu bruxellois. J’avais vu une fois et durant toute le concert je m’étais demandé pourquoi ça ne s’appelait pas Fauve bis. On a déjà dû leur dire 1500 fois, mais s’ils ne voulaient pas l’entendre, ils n’auraient peut-être pas du reprendre les thématiques de texte, les inspirations musicales et l’hystérie colérique du frontman. Ça risque de fonctionner, parce qu’évidemment c’est efficace. Moi, je n’y vois pas grand intérêt.

52013990_404634140310394_3885981470484856832_nMr Clasik; comment peut-on choisir un tel pseudo ? Je me pose cette question avant même de rentrer dans une Rotonde étonnamment remplie. Accompagné par un DJ, Mr Clasik ne ment pas sur ses ambitions, sur ses amours. Il aime le rap US des années 90 et pendant une petite demi-heure, à coup de samples efficaces, d’énergie communicative, il va mettre une super ambiance. Aucune révolution au programme, juste un amour transmis de la musique qu’il aime sans prétention. Je ne sais pas bien où ça peut aller. Mais je passe un bon moment.

Et puis les claques du festival.

On commence avec Peritelle, le nouveau projet du toujours passionnant Carl Roesems (anciennement Carl et les hommes boîtes ou Facteur cheval). Avec Versat Versatyl (Fou détective, notamment), le duo va fournir un des sets les plus surprenants de ces deux jours. Beats dansants souvent déconstruits, hip-hop malade phobique et drôlatique à la fois, ces deux hurluberlus jouent avec tout ce qui constitue un urbain un peu paumé entre deux âges. Tordu, étrange, on ne comprend pas tout, et les projections d’images au format trapézoïdal de gens courant à poil ou de Derrick ne nous permettent pas de tout remettre dans l’ordre, ni même dans le désordre. Il y a certainement une dimension blague et une autre vision que nous ne sommes pas encore en mesure de percevoir.

Le rock psyché post-punk joué fort est un des genres les plus casse-gueule qui soit. Très vite on est dans la caricature, dans le vieux truc resucé plutôt que vécu. Mais ici, avec Milk TV, rien ne sonne faux, ça rock et ça rolle, on bouge sans même s’en apercevoir, on a envie de se lancer dans des pogos désordonnés. Puis ça va vers plus de fureur mais toujours avec une bluffante sincérité. À revoir sur une durée plus longue mais très clairement un des belles découvertes de ce ProPulse.

Jour deux et demi

Je profite d’une petite pause dans ma vie pour aller l’après-midi vite voir le showcase de Valley Of Love, un des projets qui sur papier m’intrigue le plus, suscite le plus ma curiosité. Sous la férule rassembleuse du multi-instrumentiste Gil Mortio, nombre de musicien.ne.s ont été réuni.e.s pour faire un album de Noël et une sorte de show de Noël perpétuel. Dans une Rotonde déguisée en sapin de Noël pendant une trentaine de minutes on va accéder à un espace intemporel et enchanteur. Habituellement, les albums de Noël sont des disques que j’abhorre même quand ils sont la production de gens que j’adore. Mais ici, l’étrange magie opère, servie par un casting impeccable qui va des réjouissantes Faon Faon à Daniel Hélin en passant notamment par l’impeccable Anu Junnonen. Tout est subtil, beau, mystérieux, drôle. Ça fait beaucoup de superlatifs, mais c’est rare de se laisser avoir par une ambiance de conte de Noël un vendredi après-midi de février. Je veux revoir la version longue de ce spectacle que ce soit en juin par 40 degrés ou sous la pluie automnale d’un septembre. Il n’y aura enfin plus de saison ma bonne dame.

Fripouille aka Laurent Godichaux

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